Cycle de séminaires
coordonné par Christiane Étévé
Prochain séminaire : mardi 8 décembre 2020 de 17h à 19h
En ligne !
Former à l’animation d’un ciné-club : analyse comparative des sessions de formation des fédérations confessionnelles et laïques
Intervenant : Vivien Soldé, doctorant en sociologie, Université de Reims Champagne-Ardenne, Centre d’études et de recherches sur les emplois et les professionnalisations
Notre étude propose une réflexion socio-historique sur les stages de formation d’animateurs proposés par les différentes fédérations de ciné-clubs confessionnelles et laïques. Ces sessions avaient plusieurs objectifs : développer les pratiques éducatives des animateurs (présentation d’un film, organisation d’une séance de ciné-club, gestion d’un débat, etc.), compléter leurs connaissances cinématographiques (esthétique, histoire du cinéma, technique, etc.) et parfois leur faire pratiquer la technique via des stages de réalisation. Elles étaient également de formidables moyens de cohésion entre les animateurs d’un même réseau, qu’ils soient à la tête de la fédération ou dans les ciné-clubs qui y sont affiliés.
Ainsi, les annonces de ces sessions au sein des revues ou bulletins internes sont de véritables indicateurs de la puissance des réseaux, les idées qu’ils défendent et peuvent également nous éclairer sur la nature des relations entre les différentes organisations. Dès lors, il nous paraît intéressant de dresser une analyse comparative des formations proposées par les diverses fédérations confessionnelles (FLECC, Film et Vie, Film et famille) et laïques (UFOLEIS, FFCC, FFCCJ/Fédération Jean Vigo). Quels contenus et méthodes sont mis en avant ? Est-ce qu’une véritable différence est perceptible entre les approches des fédérations confessionnelles et laïques ? Quels discours sont tenus à propos des formations des autres organisations ?
Pour participer : envoyez un courriel à contact@gehfa.com Nous vous enverrons le lien qui vous permettra de nous retrouver en ligne.
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mardi 4 février 2020
L’animateur de ciné-club, de l’amateur éclairé à l’expert ordinaire.
Portrait d’un formateur par et pour l’image
Intervenant : Léo Souillés-Debats, maître de conférences en études cinématographiques à l’Université de Lorraine, Laboratoire lorrain de sciences sociales
La figure de l’animateur de ciné-club est au cœur de l’histoire de l’éducation (populaire) au cinéma en France. Cette conférence se propose de dresser un portrait de ces formateurs par et pour l’image après la Seconde Guerre mondiale en étudiant l’évolution de ces cinéphiles ordinaires au sein d’un mouvement associatif national extrêmement dense et la reconnaissance progressive de leur expertise dont la légitimité repose moins sur un statut social, une situation professionnelle ou un titre académique que sur l’expérience de la séance.
Présentation de l’ensemble du cycle
« Il est possible que les futurs historiens considèrent que l’un des événements les plus importants du cinéma depuis 1944 aura été le développement des ciné-clubs » (André Bazin, 1948).
« Nous trouvons dans les ciné-clubs nos cours du soir… » (François Truffaut, 1986, Arts).
Au moment où, en 2020, on va célébrer le centenaire des ciné-clubs, le Gehfa s’associe à la manifestation en organisant un séminaire sur leur histoire.
Quelques points de définitions et notions connexes
Au sens large, le ciné-club se présente comme un club d’amateurs de cinéma pour la promotion des films de qualité, assorti d’une présentation et d’une discussion.
Parler de « mouvement » des ciné-clubs, c’est mettre l’accent sur le rôle des mouvements sociaux dans les usages du cinéma servant différents buts : moralisation, propagande, développement culturel, éducation, sensibilisation artistique… et analyser, en retour, en quoi ce regroupement volontaire autour d’une activité de loisirs génère une forme de communauté et produit de la culture, de l’éducation, des compétences, des institutions.
À quelle sociabilité a-t-on à faire par la fréquentation des salles de cinéma ? Quels sont les acteurs ? De quelle formation et apprentissage s’agit-il ? Comment le mouvement, né au XXe siècle, a-t-il évolué au cours du siècle suivant ?
Penser en termes de mouvement social, c’est aussi croiser l’histoire de l’éducation populaire, elle-même partie de l’histoire de l’éducation des adultes, hier et aujourd’hui, et celle du cinéma, comme art et industrie culturelle, depuis sa production, sa transmission et distribution et de leurs publics. C’est donc aussi situer les politiques de la culture initiées par le ministère Jean Zay et tenir compte de la sociologie des loisirs, voire de l’anthropologie culturelle, puisque la pratique cinématographique est l’une des pratiques culturelles parmi d’autres comme le théâtre, la lecture, la musique…qui met en œuvre le pouvoir de l’imagination.
Le premier ciné-club se tient, grâce à Louis Delluc, à Paris, dans la salle des Ursulines, en 1920, mais le mot « ciné-club » a déjà été précédé de celui de « cinéphile », surgi, lui, dans les années 1908-1910, en France. La cinéphilie fait l’objet d’articles dans des revues savantes et causeries cinématographiques (Gauthier, 1999 ; Gauthier, 2000) ainsi que de pratiques variées autour des films, assimilées à des « rendez-vous entre spectateurs et films » (Ethis, 2007).
Le ciné-club se pose d’emblée comme lieu de bataille contre le cinéma commercial (le procès de Valence qui affranchit le ciné-club des taxes dues par la salle commerciale est resté célèbre, Hamery, R., 2012) et pour sa reconnaissance comme art et moyen de lutte et d’émancipation et cette position suscitera plus tard, des réactions (Langlois, Franju). La forte expansion se situe entre 1945 et 1970, sous l’influence des mouvements et des actions d’éducation populaire, confessionnelles et laïques (Soldé, thèse en cours). C’est dans cette période que Travail et culture, puis Peuple et culture, élaborent des guides et des outils pour accompagner le travail des militants (Fiche d’animation de ciné clubs, « Regards neufs sur le cinéma », intégration du film dans le Cercle culturel).
Le rôle des revues et des fédérations de ciné-clubs est à prendre en compte pour la propagation des éléments d’analyse critique en faveur de films « de qualité » et de la diffusion de l’information sur des œuvres peu connues.
À partir des années 1960-70, et sous l’influence des instituts de filmologie et des enseignements de cinéma à l’université, des débats plus théoriques circulent entre sémiologues et politiques (Barthes, Metz/Pasolini).
L’apparition de nouveaux médias et leurs configurations sociotechniques (TV, puis écrans d’ordinateurs, smartphones, abonnements à des réseaux, plates formes…) vont modifier l’accès aux films et vider peu à peu les salles de ciné-club (Hoare, 2017).
Les travaux croisant histoire du cinéma et de l’éducation des adultes existent comme le montrent la rédaction d’un ouvrage sur la réception d’un film de formation d’adultes (Laot, 2014), l’intervention de Pascal Laborderie dans un précédent séminaire du Gehfa sur le cinéma éducateur entre les deux guerres, la thèse de Léo Souillés-Debats, soutenue en Arts, celle aussi de Christophe Gauthier (2000) et celle en cours de Vivien Soldé sous la direction de F. Laot. La question du cinéma ouvrier, jusque-là, peu connue mais présente, cependant dans la recherche de C. Gauthier (1999) vient d’être documentée grâce au doctorat de Luis Felipe Cezar Mundim (2016).
Depuis 1984, l’Association française de recherche sur l’histoire du cinéma (AFRHC) et la revue 1895 fédèrent les démarches scientifiques sur cet objet.
Bibliographie indicative pour l’ensemble du cycle
Baecque, A. de et Frémaux, T., 1995. « La cinéphilie ou l’invention d’une culture ». Vingtième siècle. Revue d’histoire, 46, 1, 133-142.
Chevallier, Jacques et Egly, Max, 1963 (dir.). Regards neufs sur le cinéma. Paris : Seuil.
Darré,Yann, Esquisse d’une sociologie du cinéma, Actes de la recherche en sciences sociales, 2006, 1-2, n ° 161-162, p. 122-136.
Ethis, Emmanuel, 2005. Sociologie du cinéma et de ses publics. Paris : A. Colin.
Gauthier, Christophe, 2007. Une composition française. La mémoire du cinéma en France des origines à la Seconde Guerre mondiale. Thèse de doctorat en Histoire sous la direction de Pascal Ory.
Gimello-Mesplomb, Frédéric, 2006. La politique publique des cinémas en France. In Poirrier Philippe (dir.), Arts et pouvoir de 1848 à nos jours. Paris : CNDP/La Documentation française, p. 60-65.
Gimello-Mesplomb, Frédéric, 2015. Télécharger, envers et malgré tout, une pratique cinéphile ? Cahiers de champs visuels, 12-13, 184-210
Gimello-Mesplomb, Frédéric, Laborderie Pascal et Souillés-Debats Léo, 2016 (dir.). La Ligue de l’enseignement et le cinéma. Une histoire de l’éducation à l’image (1945-1989). Paris : Association française de recherche sur l’histoire du cinéma.
Hoare, Michael, 2017, Éléments sur l’histoire des ciné-clubs en France. Les projections non commerciales, passé, présent, avenir.
Hamery, Roxane, 2012, Les ciné clubs dans la tourmente. La querelle du non-commercial (1948-1955), Vingtième siècle, Revue d’histoire 2012/3, 115, 75-88.
Jullier, Laurent et Leveratto, Jean-Marc, 2010. Cinéphiles et cinéphilies : Une histoire de la qualité cinématographique. Armand Colin,
Leventopoulos, Mélisande, 2015, Les catholiques et le cinéma. La construction d’un regard critique (France, 1895-1958), Rennes, PUR.
Laot, Françoise, 2014, Un film comme source pour l’histoire de la formation des adultes hommes et…femmes. « Retour à l’école », Nancy 1966, PUN.
Laborderie, Pascal, 2015, Le cinéma éducateur laïque. Paris, L’Harmattan.
Montebello Fabrice, « Les deux peuples du cinéma : usages populaires du cinéma et images du public populaire », Mouvements, 2003/3, 27/28, 113-119.
Mumdim Luiz Felipe Cezar, 2016, Le public organisé pour la lutte. Le cinéma du Peuple en France et la résistance du mouvement ouvrier au cinéma commercial (1895-1914), Thèse Université Paris I-Panthéon Sorbonne, Centre d’histoire socoale du XXème siècle
Souillés-Debats, Léo, 2013. La culture cinématographique du mouvement ciné-club. Une histoire de cinéphilies (1944-1999). Thèse de doctorat ss la dir. de Fabrice Montebello et ouvrage sous le même titre (2017, Paris : Association française de recherche sur l’histoire du cinéma). Analyse en ligne par Pascal Laborderie, 2018. Études de communication, n° 33, p. 350-351
Peuple et Culture Regards neufs sur le cinéma, Seuil, Pec, 1953.